Christian
Henriot historien et membre de
l'Institut universitaire de France, directeur de l'Institut d'Asie orientale.
Belle de Shanghai s'inscrit dans la continuité de tes travaux sur l'histoire
urbaine et sur l'économie industrielle chinoises contemporaine. Les sources,
souvent peu nombreuses, biaisées ou incomplètes utilisées pour Belles de
Shanghai témoignent de la difficulté et de l'opacité à traiter le thème de
prostitution au 19ème et au 20ème siècle en chine.
L'analyse
proposée par l'auteur s'articule autour de quatre grands pôles destinés à nous
livré de manière aussi complète que possible une vision socio économique de la
prostitution, des acteurs qui la compose et des enjeux commerciaux liés à
celle-ci. Dans son introduction C. Henriot propose la prostitution à Shanghai
comme "un baromètre[...]de
modernisation dont la ville a fait l'expérience".
Cette
image permet au lecteur d'appréhender cette ouvrage pour ce qu'il est; un moyen
de jauger sur divers critères le Shanghai des années 1842 à 1949, soumis aux
modes occidentales, aux répercussions politique des guerres. La femme
prostituée sert ici de loupe pour
dresser un état du monde: le nivellement de la société, la stratification de la
population, le statut de la femme, l'influence occidentale sur l'organisation
d'une ville.
Les
deux premières parties dressent les
fondamentaux de cette étude: les prostituées. Qui sont elles, quel est leurs statuts, de quelle liberté jouissaient-elles,
y a t-il une hiérarchie des prostituée? De femme respectée, formée aux arts( pendant
le 19ème siècle), le filtre temporel la ramène à un simple objet sexuel(entrée dans le 20ème
siècle). Sa compagnie, la distraction qu'elle propose auparavant miroir de réussite n'a plus de signification
ou d'intérêt; seul le plaisir physique compte; si possible à un moindre coût.
A
l'origine le tissu de la prostitution du
19ème siècle était simple, la maison close gérant la vie et le rythme des
prostituée, ce qui dans une certaine mesure garantissait une qualité de service
supérieure pour les classes sociales huppée par rapport au petit peuple.
Cependant ce modèle tend à s'effacer puis a disparaître au 20ème siècle ou se créer un
"boom" de la prostitution; la demande devenant plus forte et plus
variée, l'offre s'est adaptée. ce qui a mis à jour un problème de santé
publique: les maladies vénériennes. Cette question, tabou dans la société
asiatique du 19 et 20ème siècle est la réponse à l'absence d'hygiène malgré
l'augmentation du nombre de passe. le regard social constate dans le même temps
une plus grande propension à la pauvreté, la souffrance et à la violence.
L'explosion du nombre de lieu destinés à la prostitution, le nombre de
prostituées pose alors la question des conditions de recrutement et de mode de
vie de ces prostituées du 20ème siècle. Sans surprise, on découvre y apprends
que l'accès au métier de prostituée n'est jamais sauf en de très rare cas
volontaire: vendue, mise en gage, enlevée. Tel est le risque pour les femmes
sans protections à cette époque.
Ces
questions économiques sont l'objet de la troisième partie de ce livre. de
manière très descriptive l'auteur évoque la complexité de l'administration des
maison de prostitution , des questions de tarification, de taxation, que
rencontre les maison de prostitution. L'évolution des lieux de prostitutions à
conduit leur tenancier à engager davantage de personnel: servantes, surveillant dans les dancings; autant de
créations d'emploi qui ne conduise qu'à un durcissement du traitement infligé
aux prostitués.
La
quatrième partie enfin s'intéresse aux tentatives de réglementer la
prostitution à Shanghai. ces réglementations ayant particulièrement deux visées: la santé
d'abord; afin d'endiguer la prolifération des maladies vénériennes; humaine et
judiciaire enfin; le regard occidentale( dans un premier temps), ainsi que
l'augmentation d'expatrié occidentaux force
les locaux à s'inquiéter de la situation de la prostitution à Shanghai. Des
associations émergent afin de venir en aide à celle qui ont une occasion de
fuir leur proxénète tandis que la législation se durcit- bien que mal et
difficilement appliquée- autour des questions
de prostitution forcée, de vente et de l'âge des prostituées.
Pour
conclure, l'auteur met l'accent sur la
condition de la femme au 19 et 20ème
siècle. la prostituée existe par
l'usage commerciale de son corps, du moins existe-elle. La femme mariée,
elle n'a pas d'existence , ni de
reconnaissance, elle reste cloitrée chez elle, la plupart du temps ignorante et
ignorée de tous. Alors que la société est en pleine évolution la femme
elle reste ancrée dans une immobilité
imposé par une société à dominante patriarcale.
La
lecture de cette ouvrage a quelque chose
de très frustrant; un témoignage d'une
personne en lien direct avec le milieu de la prostitution aurait pu apporter
davantage de précision. Toutefois j'ai beaucoup apprécié ce point de vue
atypique ; cette approche monographique de Shanghai via la spécificité du
groupe des prostitués.
REDJEM Alicia